mercredi, octobre 22, 2008
On s'en fout, par Richard Martineau
La devise de la Belle Province a beau être «Je me souviens», les Québécois sont les êtres les moins rancuniers au monde.
Il suffit de regarder les résultats des élections fédérales pour s'en rendre compte.
MONSIEUR JOE LOUIS
Prenez Maxime Bernier.
Pendant des semaines, les journalistes et les commentateurs du pays ont répété à quel point l'ex-ministre des Affaires étrangères manquait de jugement.
Non seulement a-t-il fréquenté une femme qui avait des liens avec des membres du crime organisé, mais il a même laissé des documents confidentiels chez elle!
De plus, quand monsieur Bernier est allé visiter les soldats québécois en Afghanistan, il insistait pour que les militaires se fassent photographier en train de manger des Joe Louis afin de faire plaisir à un entrepreneur de sa région.
Imaginez: utiliser des jeunes qui risquent leur vie chaque jour pour faire de la pub! Faut être tapon pas à peu près...
Or, qu'ont fait les électeurs du comté de Beauce devant cet état de fait?
Ils ont dit «On s'en fout», et ils ont réélu Maxime Bernier.
LA FEMME INVISIBLE
Passons à Josée Verner.
La ministre du Patrimoine, de la Condition féminine et de la Francophonie a accumulé les gaffes pendant la campagne. Tous les journalistes et commentateurs du pays ont souligné son incompétence, son incapacité à expliquer clairement les décisions de son gouvernement et sa tendance à prendre la poudre d'escampette quand on voulait la questionner sur les coupes effectuées dans le secteur culturel.
Preuve que madame Verner est à côté de ses pompes: elle n'a même pas voté pour son propre parti mardi! Au lieu de voter dans la circonscription qu'elle représente, comme la loi électorale l'autorise, elle est allée voter dans la circonscription où elle habite - et où le Parti conservateur ne présentait aucun candidat...
Or, qu'ont fait les électeurs de Louis-Saint-Laurent devant cet état de fait?
Ils ont dit «On s'en fout», et ils ont réélu Josée Verner.
PAS SI VERT QUE ÇA
Thomas Mulcair, maintenant.
Selon une enquête-choc du Devoir, l'ex-ministre de l'Environnement libéral a empêché Hydro-Québec de donner une subvention de deux millions de dollars à un groupe écologiste qui lutte contre les changements climatiques parce que Jean Charest («le patron», comme il le surnommait dans ses courriels) trouvait ces militants trop péquistes à son goût.
Pas mal, pour un politicien qui se targue d'être vert, non?
De plus, pendant la campagne, le député néo-démocrate s'est promené aux côtés d'une candidate qui a milité au sein d'un organisme prônant la charia.
Or, qu'ont fait les électeurs d'Outremont devant cet état de fait?
Ils ont dit «On s'en fout», et ils ont réélu Thomas Mulcair.
CRIER DANS LE DÉSERT
Au cours des derniers jours, on a beaucoup écrit sur le fossé qui se creuse entre les artistes et la population.
Mais il semble que les artistes ne soient pas seuls à parler dans le vide. Les journalistes, les analystes politiques et les chroniqueurs aussi crient dans le désert.
Jour après jour après jour, pendant cette campagne, on vous a dévoilé les incompétences et les incohérences de tel ou tel politicien.
Et vous, qu'est-ce que vous avez fait?
Vous avez haussé les épaules et vous les avez réélus. Coudonc, on sert à quoi, nous?
Libellés : Élections, Richard Martineau
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